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Introduction

Les ingestions de produits caustiques sont le plus souvent accidentelles chez l’enfant.

Elles sont favorisées par le stockage de produits caustiques dans des contenants déconditionnés.

Détail

Substances caustiques ingérées :

Les bases fortes (pH>12) sont représentées par la soude caustique (NaOH), la potasse (KOH) et l’ammoniaque (NH4OH). Elles entraînent une nécrose de liquéfaction avec des lésions qui pénètrent en profondeur.

Les acides forts (pH< 2) regroupent l’acide chlorhydrique (HCl), l’acide sulfurique (H2SO4), l’acide formique, l’acide fluorhydrique et l’acide phosphorique. Ils entraînent une nécrose de coagulation, avec des lésions superficielles, plutôt gastriques et duodénales.

 

Prise en charge initiale :

  1. Laver les yeux et la face à l’eau, retirer les vêtements imprégnés et laisser à jeun.
  2. Proscrire l’absorption de liquide ou de produits « neutralisants », les vomissements provoqués et les lavages gastriques.
  3. Recueillir un échantillon et/ou le flacon d’emballage du produit afin de préciser la composition et le pH (mesure possible du pH avec une bandelette urinaire).
  4. Transfert dans un centre hospitalier ayant un plateau technique adapté : réanimation, endoscopie et chirurgie.
  5. Contacter un endoscopiste digestif pour discuter l’indication de l’endoscopie pour toute ingestion de produit caustique de pH < 2 ou pH > 12 ou oxydant en raison d’une mauvaise corrélation entre signes cliniques et lésions endoscopiques.

 

Endoscopie œsogastroduodénale :

L’endoscopie digestive doit être réalisée dans les 12 à 24 heures pour ne pas sous-évaluer les lésions et limiter le risque de perforation endoscopique. Un cliché thoracique préalable doit rechercher une éventuelle perforation et des lésions du poumon. Un examen ORL peut être indiqué lors de présence de brûlures oro-pharyngées.

Classification de Zargar :

  • Stade 0 : normal
  • Stade 1 : érythème, œdème
  • Stade 2a : ulcérations superficielles, fausses membranes, hémorragies muqueuses 
  • Stade 2b : ulcérations creusantes et confluentes 
  • Stade 3a : nécrose focale (non circonférentielle) 
  • Stade 3b : nécrose diffuse (circonférentielle) 
  • Un 4ème stade utilisé par certains auteurs, correspond à une modification de cette classification : perforation.

Cette classification a un intérêt thérapeutique et pronostique, la fréquence des complications étant nettement augmentée à partir du stade 3b.

Traitement

  1. Inhibiteurs de la pompe à protons : recommandé pendant 6 semaines pour éviter que des lésions œsophagiennes peptiques ne se surajoutent aux lésions caustiques.
  2. Antibioprophylaxie : limiterait l’incidence des sténoses (céphalosporine et gentamycine ; stade ≥ 2b).
  3. Corticoïdes : intérêt potentiel de corticoïdes à forte dose (1g/1,73 m2) par voie intraveineuse pendant 3 jours pour prévenir la survenue de sténoses œsophagiennes, uniquement dans les stades 2b.
  4. Alimentation : voie orale ou entérale à privilégier, généralement possible 24-48h après l’ingestion.
  5. Chirurgical : résection œsophagienne ou gastrique à discuter en phase aigue lors de nécrose diffuse et circonférentielle (stade 3b) pour éviter l’extension de la brûlure aux organes de voisinage.

Complications

  1. Complications précoces : principalement respiratoires, parfois hémorragies digestives, rarement métaboliques (hépatiques et rénales).
  2. Tardives (après 3 semaines) : sténoses œsophagiennes surtout. Elles sont souvent complexes (longues, tortueuses, serrées et multiples). Une endoscopie digestive ou une opacification sont utiles à réaliser 1 mois après l’ingestion dans les formes à risque (stade ≥ 2b). L’efficacité des dilatations serait meilleure en cas de dilatation précoce (entre 3 et 6 semaines). Il n’y a pas de recommandation pour l’utilisation de prothèses œsophagiennes. A distance de la phase aigue (> 6 mois), des sténoses étendues (> 9 cm) et/ou résistantes aux traitements endoscopiques nécessitent une intervention chirurgicale (coloplastie ou tube gastrique).
  3. Carcinome épidermoïde : le risque est augmenté par rapport à la population générale justifiant une surveillance endoscopique 15 à 20 ans après l’exposition, avec coloration (acide acétique, lugol) selon l’ASGE et la SFED.

Références

  1. Mas E, Breton A, Lachaux A. Management of caustic esophagitis in children. Arch Pediatr 2012;19:1362-8.
  2. Thomson M, Tringali A, Dumonceau JM, et al. Paediatric Gastrointestinal Endoscopy: European Society for Paediatric Gastroenterology Hepatology and Nutrition and European Society of Gastrointestinal Endoscopy Guidelines. J Pediatr Gastroenterol Nutr 2017;64:133-53.
  3. Usta M, Erkan T, Cokugras FC, et al. High doses of methylprednisolone in the management of caustic esophageal burns. Pediatrics 2014;133:E1518-24.